Les défis de la rénovation énergétique du parc bâti ancien
La rénovation énergétique du parc bâti ancien, dans le respect de notre patrimoine architectural, est un enjeu technique des plus passionnants.La rénovation énergétique du parc bâti ancien, dans le respect de notre patrimoine architectural, est un enjeu technique des plus passionnants.
Mais :
- Est-il pertinent techniquement de mettre en œuvre les épaisseurs d’isolants induits par les cahiers des charges des aides financières sur des murs anciens ?
- Quels sont les impacts des phénomènes de condensation, remontées capillaires, transfert de vapeur d’eau ?
- Comment anticiper l’impact de nos projets de rénovation énergétique sur les risques de pathologies ?
Nous savons que rénover un bien, c’est perturber un équilibre. Alors rénovons de manière cohérente et dans le plus grand respect des équilibres en place. Pour ce faire, nous devons comprendre les différents phénomènes d’humidification.
Est-il pertinent de mettre en œuvre les épaisseurs d’isolant induits par les cahiers des charges des aides financières sur des murs anciens ?
De quoi parle-t-on ?
Nous parlons de presque 35% des maisons individuelles rénovées énergétiquement qui ont été construite avant 1948.
Afin de pouvoir bénéficier des aides, une épaisseur d’isolant supplémentaire est imposée sans se soucier de :
1/ la qualité et la continuité de l’isolant déjà existant
2/ la cohérence globale du projet
3/ l’état sanitaire de l’existant (moisissures, mérules, polluants)
Différentes pathologies :
1/ Ajouter de l’isolant sur une paroi déjà isolée c’est renforcer l’impact du pont thermique existant
Le blocage du passage des calories au droit de l’isolant renforce le flux sur les ponts thermiques et accroit la différence de température de surface entre la paroi isolée et ici le plancher.
Le courant d’air chaud passant au droit du point froid va engendrer une zone de condensation et finalement des moisissures.
Mieux vaut isoler moins et mieux, car c’est l’ajout d’isolant qui génère la pathologie.
2/ Même si les travaux de rénovation énergétique ne sont pas réalisés en même temps, il est important de phaser les travaux de façon cohérente.
L’isolation des parois doit être phasée de façon à réduire les écarts de température entre les parois.
Les écarts de température entre parois engendrent des risques de condensation et donc de moisissures. Ils génèrent également un inconfort lié à la sensation de paroi froide (température ressentie) mais également lié au flux d’air par convection entre paroi chaude et paroi froide.
Il est indispensable avant de décider quelle paroi je vais isoler en priorité, de mesurer à l’aide d’un thermomètre laser (quelques dizaines d’euros) les écarts de température entre les parois (murs, sol plafond).
En multipliant les points de mesure, il est possible d’identifier les ponts thermiques important déjà existant. Attention, cette mesure doit être réalisée sur bâtiment chauffé (voir surchauffé pour l’occasion) et température extérieur froide.
3/ Attention aux signes de dégradation du bâti, les pathologies existantes ne vont pas disparaitre en appliquant un enduit ou une peinture sur les murs.
Les pathologies nous renseignent sur un déséquilibre existant ou passé
- Les moisissures nous amènent à analyser l’état de la ventilation ainsi que la préexistence de points froids sur les parois
- La présence de champignons doit attirer toute notre attention, identifier le champignon et comment l’éradiquer. Attention à la mérule !
- L’identification des produits toxiques (plomb, amiante) qui ont dû être identifiés au diagnostic immobilier
- Auréoles au plafond indiquant un risque de dégât des eau lié à la couverture du bâtiment. Ce dégât des eaux a-t-il été traité correctement ?
- Cloquage des enduits ou des peintures en partie basse des murs sur 1m, 1.50m nous renseigne sur un risque de remontées capillaires
- Une odeur de bâtiment ancien prononcée doit attirer notre attention sur la présence d’humidité
- La présence de salpêtre indique une charge en sels hygroscopiques qui vont pénaliser la pérennité des travaux de rénovation.
Investissement dans un diagnostic préalable pour une rénovation cohérente et durable
En conclusion, et sans vouloir aller au-delà du bon sens, il est impératif d’investir du temps et quelques moyens financiers pour réaliser un diagnostic avant rénovation.
Ce diagnostic doit comprendre :
1/ une cartographie des isolants en place (nature, épaisseur, état et continuité) sur l’ensemble des parois. Faire des sondages, des mesures au thermomètre ou mieux, si vous disposez d’un budget, passage de caméra thermique par un professionnel dont c’est la seule activité.
2/ diagnostic de la ventilation (présence, débits, respect du principe de balayage)
3/ diagnostic des pathologies existantes ou passées (moisissures, cloques sur les peintures ou sur les enduits), salpêtre, odeurs persistantes.
Ce diagnostic va permettre d’améliorer la qualité de la rénovation, d’améliorer la qualité de vie à l’intérieur du bâtiment, le confort et la qualité de l’air intérieur et va surtout pérenniser les investissements.